Je me souviens d’un temps où j’avais peur, très souvent, sans raison particulière.
Quand ça n’allait pas, j’avais peur que cela n’empire et que la situation devienne catastrophique. Quand tout allait bien je pensais mon bonheur non mérité. J’imaginais qu’un malheur allait arriver pour équilibrer cette usurpation de temps heureux… J’avais comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Je pensais que me préparer au pire me protégerait… J’avais tout faux. Se tenir sur le qui-vive ne prépare à rien. Et ça gâche la vie au quotidien.
Tout figer pour se rassurer
Pour me rassurer, j’essayais de prévoir, à l’infini, ce qui pourrait se passer : avec ce nouveau client trop exigeant, avec mes enfants que je comprenais mal, avec cette amie qui avait besoin d’aide… J’essayais d’imaginer ce qui allait advenir et comment j’allais réagir… J’essayais de trouver toutes les solutions avant même que le moindre problème ne soit posé…
Je pensais que plus j’envisagerais de possibilités, plus je serais aguerrie, intouchable, inattaquable… Bien entendu les aléas et les échecs n’en étaient que plus douloureux… Je m’étais peu à peu habituée à vivre dans une forme de panique, sourde, discrète, mais bien présente, dont je ne voyais pas l’issue.
Et pendant ce temps-là, je passais à côté de ma vie.
Faire face à la peur
Un jour, un peu par hasard, j’ai découvert la méditation. Je me suis inscrite à un stage d’une semaine pour apprendre à pratiquer, dans l’espoir que cela m’aiderait à me calmer. Loin de me calmer, cette semaine m’a redonné allant, énergie et joie de vivre ! Au fil des sessions de pratique, je découvrais que je pouvais regarder ma peur en face, et qu’il ne se passait rien d’autre que de voir ma peur en face ! Je veux dire par là, aucune catastrophe, aucune malédiction ne me « tombait » dessus. J’étais juste une femme, normale, qui a peur. Une peur prenante certes, mais somme toute assez ordinaire.
La méditation m’a appris à rester avec cette peur, à m’asseoir avec elle. À lui faire une petite place sur le coussin avec moi et à voir qu’elle n’avait rien de solide. Qu’elle ne présageait pas spécialement de malheur à venir mais montrer juste ma crainte de l’inconnu.
L’inconnu, un ami inattendu !
Apprivoiser l’inconnu, c’est-à-dire accepter le fait que je ne puisse pas tout maîtriser, que je ne puisse pas tout prévoir, que je ne puisse pas protéger mes enfants de tout, fût le chemin – parfois chaotique – de mes premières années de pratique. J’ai ainsi découvert que la parfaite maîtrise de tout n’existe pas et que c’est folie d’y croire.
Ne serait-ce pas d’ailleurs la folie du monde d’aujourd’hui ? Croire que l’on peut tout gérer, tout exploiter, tout contrôler…
Les abominations de l’Histoire ne nous ont pas suffi. Nous vivons encore dans l’illusion que notre futur est maîtrisable ! Il est temps de réhabiliter la part d’inconnu qui constitue toute vie.
S’ouvrir au présent
La méditation nous invite à accueillir ce qui arrive, instant après instant, sans savoir à l’avance. À nous ouvrir au présent, seconde après seconde, avec la plus grande curiosité.
À retrouver notre capacité à découvrir, à nous laisser surprendre et à nous émerveiller de la surprise !
La pratique de la méditation nous propose une détente, la grande détente, qui est synonyme de courage. Nous apprenons à danser avec l’imprévu. Et nous voyons aussi que, bien souvent, cet inconnu n’a rien de menaçant mais offre une occasion de se réveiller, de se réinventer, d’être créatif avec la vie.
Le goût de l’aventure
La méditation m’a donné le goût de l’aventure ! J’ai découvert le plaisir de ne pas savoir, de me laisser surprendre. Quand je vais voir une exposition, je suis toujours étonnée que ce ne soit pas du tout le tableau que je suis venue voir qui m’interpelle le plus une fois sur place. Quand je rentre à la maison après une journée de travail, je suis toujours étonnée par l’ambiance qui y règne, qui n’est jamais la même : les parfums, les lumières, les bruits sont à observer à neuf à chaque fois. Quand je pars en rendez-vous, je fais davantage attention à l’état dans lequel je me trouve, à la qualité de ma présence corporelle par exemple, qu’au scénario fictif que je peux m’inventer.
Serait-ce cela le vrai bonheur ? Pouvoir prendre plaisir à accueillir la part d’inconnu de notre vie ?
Notre monde moderne s’active énormément à nous faire croire qu’il faut tout prévoir et qu’ainsi nous serons heureux.
Un des grands malheurs de la vie moderne, c’est le manque d’imprévu, l’absence d’aventures.
écrit le poète Théophile Gautier dans Voyage en Espagne.
Méditer c’est redonner sa dimension d’aventure à la vie.
Merci !
Je viens de découvrir votre blog et j’ai déjà dévoré plusieurs articles, allongée tranquillement sur mon canapé le soleil diffusant une lumière chaude à travers les persiennes…bonheur.
Merci pour votre formidable travail d’écriture qui m’éclaire d’une chaude lumière lui aussi. Bonheur !
Merci beaucoup pour votre commentaire Juliette. Ça me fait plaisir et m’encourage à poursuivre ce travail de partage d’expérience et d’écriture. Bon week-end… ensoleillé ! Marie-Laurence